moment of truth (w: nysa)

Il hésita au dernier moment. Il embrassa la porte du regard, en proie à une drôle de sensation. La curiosité presque viscérale s’opposait en lui à une forme de frustration dont il ignorait que Nysa était seulement encore capable de l’attiser. Il hésitait, rongé par un drôle de pressentiment.
Peut-être que cela était dut aux mots préalablement échangés avec Noah. Au regard dur, terni, de son ami lorsqu’il lui avait clairement laissé entendre que Nysa avait commis un acte qui justifiait largement son nouvel isolement et qu'il ne fallait pas qu'il se laisse convaincre qu'elle était une victime en aucune façon.
Quoi qu’elle ait bien pu faire, cela revêtait une importance suffisante pour la rejeter hors de la scène public. Une soudaine disparition qui commençait à faire du bruit dans tout Rezbia. Quel que soit le crime signé de la main de Nysa, Naegel n’était pas certain d’avoir seulement envie, ou plutôt besoin de le connaître. Cette part de lui, craintive mais raisonnée, s’opposait à une curiosité dont il savait qu’elle allait pourtant fatalement l’emporter.
La guerre rendait la situation suffisamment tortueuse sans qu’il ne prenne volontairement le parti de s’embourber davantage dans l’indécision et l'absence d'information. Outre sa curiosité, sa position au sein du royaume impliquait qu’il soit capable de diriger intégralement son esprit vers les batailles à mener au nom du Cercle. Il ne pouvait pas se permettre de se placer au coeur de l’action si une part de lui, reculée, cachée, restait accrochée à Nysa et à ce qu'elle avait bien pu faire pour s'attirer pareille colère.
Non. Il lui fallait savoir. Et il lui fallait entendre la vérité de sa bouche. Il voulait lire l’aveux dans ses yeux avant même qu’il n’atteigne la barrière ardue de ses lèvres. Et outre tout cela encore, il voulait simplement la voir. Se tenir devant elle, à nouveau, s’assurer qu’elle allait bien. Non qu’il soit véritablement inquiété pour elle, pas vraiment. Ce n’était pas comme si elle risquait quoi que ce soit. Si Noah ne l’avait pas exécutée pour trahison, c’était pour une raison peu compliquée à trouver. Il ne pouvait pas se permettre d’exposer la perte aussi sonore d’une alliée. La perte d’une femme. Le roi de Valdierva ne pouvait décemment pas faire l’étalage de pareille faiblesse, pas alors que tant de forces s’opposaient couramment au Cercle.
La vie de Nysa n’était donc pas menacée dans l’immédiat. Une idée rassurante, mais indiscutablement insuffisante. Naegel avait besoin de plus. Et c'était ce qu'il était venu récolter. Refusant de se laisser plus de temps pour changer d'avis, il serra le poing, leva le bras et abattit sobrement sa main contre la porte.
Trois petits coups serrés.
Un. Deux. Trois.
Il laissa ensuite retomber son bras et, dressé de toute sa hauteur, il attendit, non sans avoir l'impression que les secondes s'étiraient désormais d'une façon bien insolente.

@nysa sielle

Elle tourne en rond, la louve, comme un animal en cage. L'esprit préoccupé par les derniers événements, elle ne parvient pas à trouver le repos. Quand ce n'est pas Noah, sa présence dans sa chambre il y a seulement quelques jours, et tout ce que cette situation a éveillé en elle, qui la tourmente, alors ce sont les Dieux et leurs rêves, l'apparition de Hioki dans son miroir, et le tsunami qui s'est abattu sur une partie de leur territoire. Elle sait que tout ça est lié, ça doit forcément l'être. La coïncidence est trop grosse pour en être vraiment une. Pourtant, même Nysa a bien du mal à trouver un sens à tout ce qui se passe. Elle peine à assembler les pièces du puzzle, et ça la frustre. Du fond de sa chambre, c'est peut-être la seule mission qu'elle s'est fixée : comprendre ce que les Dieux leur veulent. Intérêt tourné à l'obsession, voilà la seule chose sur laquelle elle peut encore travailler et se concentrer, la seule chose qui lui donne encore l'impression de servir à quelque chose, même si Noah peine à la croire, pour l'instant.

Alors, lorsque les coups retentissent contre la porte de ses appartements, elle ne peut être que soulagée, la louve, bien que surprise aussi. La plupart des visiteurs qui viennent la trouver ici ne se donnent pas la peine de frapper. Seuls les serviteurs et les gardes annoncent encore leur entrée, mais pas de cette manière. Elle s'est surprise à reconnaître la façon de toquer de chacun, associant un visage ou un nom au son avant même que les portes ne s'ouvrent. Alors cette fois-ci, elle sait que ce n'est aucun des gardes ou serviteurs habituels. Peut-être un nouveau, mais cela étonne la Sielle que Noah fasse confiance à un autre pour venir la voir. « Entrez! » Elle élève la voix tout juste assez fort pour que la personne de l'autre côté de la porte ne l'entende. Finalement, les portes s'ouvrent pour dévoiler une silhouette bien connue de la louve. Un instant, elle reste figée face aux prunelles qui se posent sur elle. Naegel la dévisage, et Nysa est incapable d'interpréter ce regard qu'il lui lance. De toutes les personnes qui auraient pu franchir cette porte, peut-être que le militaire était l'un des derniers qu'elle s'attendait à voir. Pourquoi, elle ne saurait l'expliquer. Peut-être car, avant qu'il ne se décide à rejoindre leur cause, des années se sont passées sans nouvelles, sans aucune interaction. Des années à l'observer de loin, malgré tout, à garder un œil sur son parcours, sur son avancée, à éprouver une certaine fierté à chaque réussite, à chaque tableau brillant que l'on dressait du commandant Oaklong. Malgré les années, elle n'a jamais rien ressenti d'autre que de l'affection pour cet homme. Jamais la rancœur n'est venue entravée cette relation, même lorsque leurs vies ont fini par prendre des chemins différents. Alors c'était presque simple, lorsque son chemin l'a mené jusqu'à elle, jusqu'à eux, à nouveau. Lorsqu'ils ont dû apprendre à retravailler ensemble. C'était presque comme si rien n'avait changé, comme s'ils étaient toujours dans cette caserne, à œuvrer pour le même but. Et pourtant. La Sielle sait que tout est différent, aujourd'hui.

« Je ne m'attendais pas à te voir ici. » Une honnêteté presque brutale que Nysa lui offre. Elle a toujours eu bien plus de mal à garder ses secrets pour elle en la présence de Naegel. Pourtant, aujourd'hui, elle aimerait pouvoir garder le silence. Elle aimerait ne pas savoir ce qui l'a amené à venir ici. Elle aimerait penser qu'il n'est pas déjà au courant. Elle aimerait croire qu'il ne la voit pas comme une meurtrière, comme une harpie. Elle aimerait qu'il ne pose pas sur elle le même regard que Noah, elle aimerait ne pas y lire le même dégoût et la même déception. Et pourtant, elle est persuadée qu'elle n'y échappera pas. Probablement que Naegel ne reconnaît pas, lui non plus, la femme qu'il a un jour aimé. Peut-être que, comme les autres, comme Noah, comme Arabella, comme Pavel, se demandera-t-il où cette femme est passée. si elle a un jour seulement existé. « Viens-tu, toi aussi, voir la reine déchue de tes propres yeux? »

@naegel oaklong

Un instant s'écoula avant qu'une réponse ne lui parvienne. La voix de Nysa, parfaitement reconnaissable, l'invitant à entrer. Alors ce fut ce qu'il fit. Non sans qu'une pointe de réticence ne fit trembler sa main, il la referma sur la poignée et la fit tournoyer pour entrer dans la pièce. A peine entré, il referma instantanément la porte derrière lui avant de, enfin, relever sur les yeux sur Nysa. Il accrocha son regard au sien et tâcha d'interpréter son impression. Il lui était aisé de percevoir sa surprise. Elle ne s'était pas attendue à sa venue. En revanche, il lui était plus ardu de savoir si cette perspective la contrariait ou non. Il ne s'était guère attendu à ce qu'elle se rue dans ses bras. Pareille attitude l'aurait plus déconcerté qu'autre chose à vrai dire. Malgré tout... « Je ne m'attendais pas à te voir ici. » Cela non plus, il ne l'avait pas vraiment prévu. Ce ton incisif, brute. Presque accusateur en fait, comme s'il avait commis un impair quelconque en venant la trouver. Comme s'il était celui, d'eux deux, qui venait de se rendre coupable d'un acte répréhensible.
Naegel en fut honnêtement vexé, mais il tâcha de réfréner cette émotion. Son expression se fit nettement plus dure, s'accordant mieux à celle arborée par sa reine, quand bien même ses yeux persistaient à conter malgré lui une curiosité teintée de tristesse et compassion. Sans doute l'attitude défensive de Nysa n'avait-elle strictement rien à voir avec lui. Elle était prisonnière après tout, pour ainsi dire. Il ne lui fallait pas l'oublier. Une prison bien glorieuse que la sienne, mais une prison tout de même. Compte tenu de ces circonstances peu enviables, il n'était pas aberrant qu'elle soit de si mauvaise humeur. « Viens-tu, toi aussi, voir la reine déchue de tes propres yeux? » Etait-ce à quoi elle avait été exposée jusqu'alors ? Une suite de visites tantôt moqueuses, tantôt furieuses ? Voilà qui attisait encore plus la curiosité déjà largement piquée de Naegel. Qu'avait-elle fait pour justifier pareil chute ? La reine déchue.
Il lui aurait été aisé de répondre avec humeur à ses propos piquants, peu glorieux. il n'était cependant pas venu la trouver pour se quereller avec elle. Il voulait des réponses et, de préférence, il avait envie de les entendre de sa bouche.
« Je suis venu te voir toi » énonça-t'il d'une voix calme. Car si elle était désormais sa reine, du moins de façon visiblement purement officielle, elle n'en restait pas moins avant tout Nysa. Une figure pro-éminente de son passé. Elle avait beaucoup compté pour lui par le passé et, s'il se gardait bien de l'admettre ouvertement à présent, force était pour lui d'accepter qu'elle comptait toujours. « Qu'est-ce que tu as fait, Nysa ? » Inutile de tourner autour du pot. il ne se sentait pas cette patience et suspectait fortement qu'il en allait de même pour elle. Elle devait déjà trouver le temps suffisamment long, inutile d'en rajouter en étirant ridiculement leur conversation.

@nysa sielle

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» No evil is ever as black as painted ⚔ Nysa
» ⟨ TOME 2 ; CHAPITRE 2 ⟩ THE WRATH OF THE GODS (nysa)
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